La faune

Le Juste Jardin, un "lieu d'exemplarité écologique"

Gilles Clément espérait que son Juste Jardin deviendrait un 'lieu d'exemplarité écologique".
Le jardin n'est pas pour lui seulement un "espace composé où s'expriment les formes, les couleurs, les textures, et les perspectives, c'est un lieu de vie"...

Focus sur deux animaux du Juste Jardin : le hérisson et le merle.

Le Hérisson, un hôte de marque

Hérisson

Le Merle noir, un nouveau citadin

Merle mâle

Les hérissons à l’ENS

Dans ses premières années, né d'un terrain entièrement remanié au sein duquel les équilibres écologiques furent longs à se mettre en place, le jardin a connu une prolifération mémorable d'escargots. Heureux consommateurs de jeunes pousses et peu inquiétés par les prédateurs, ils s'en sont donné à cœur joie jusqu'à l’introduction de l'ami hérisson, qui a naturellement mis des limites à la population florissante des estomacs sur pied. Aujourd'hui, si l'on découvre toujours régulièrement des imprudents écrasés sur les allées après une matinée fraîche et humide, on peut dire qu'un certain équilibre a été atteint : les plantes ne sont plus massacrées par les hordes voraces, mais les escargots n'ont pas été décimés pour autant. Vous les remarquerez, lors des journées chaudes, accrochés à des tiges ou des branches graciles, attendant patiemment, hors de portée des hérissons, le retour de la fraîcheur.

Le merle citadin depuis quand ?

Vous l'avez sans aucun doute déjà rencontré dans une pelouse en train de se nourrir, peut-être même avez-vous pris le temps d'écouter un soir son chant agréablement flûté émis depuis un point haut. Peu d'espèces d’oiseaux nous sont aussi familières que le Merle noir (Turdus merula) qui occupe très bien les espaces verts de nos villes.

Pourtant, le Merle n'a conquis les milieux urbanisés que récemment à l'échelle de son histoire. Avant le début du 19ème siècle, il fréquente en effet principalement les forêts et les milieux ruraux plus ouverts avant de commencer à pénétrer les villes en colonisant d'abord leurs banlieues puis en s'installant dans les grands parcs et les jardins.

Un auxiliaire indispensable

Escargots, limaces, insectes divers, vers, larves, mais aussi grenouilles, crapauds, serpents, œufs, cadavres d'animaux, champignons, racines, fruits, herbes… font le menu du hérisson, un parfait omnivore. La consommation des gastéropodes est la raison première pour laquelle il est bienvenu au jardin. Même s'il s’attaque aussi à des organismes bienvenus, le bilan net de son action est très largement positif, et sa présence est fort appréciée.

Une espèce menacée

Le principal prédateur du hérisson est l'Homme, avec 26 % de la mortalité totale imputée aux pesticides (ironiquement, par les anti-limaces notamment) et 25 % ayant lieu sur les routes. Nous sommes donc activement responsables de la mort de plus de la moitié des représentants de l'espèce sur notre territoire, sans compter la prédation par les chats et chiens domestiques, ni les morts par piégeage involontaire (pièges à rongeurs, piscines, caves, grillages, déchets dangereux…).
Comme la plupart des espèces sauvages, sa population est fortement menacée par la disparition de son habitat. L'industrialisation de l'agriculture a notamment un impact très important sur cet animal affectionnant les haies bocagères, éléments de territoires ruraux peu propices à la mécanisation.

Quelques gestes simples

On offre parfois du lait ou du fromage à manger aux hérissons des jardins. Ils en raffolent effectivement, mais c'est en réalité totalement proscrit car ils sont intolérants au lactose. Pour attirer ou aider des hérissons de passage, mieux vaut leur mettre à disposition quelques croquettes pour chien ou chat. Mais un jardin riche, bien équilibré et surtout sans pesticides constituera déjà un havre en soi, et hormis à l'approche de l'hiver, période critique durant laquelle le hérisson s'engraisse avant d'hiberner, la nourriture y sera suffisante.
Les hérissons souffrent également de diverses formes de parasitisme, qui sont responsables d'un affaiblissement général, causant une mortalité hivernale importante (prise de poids insuffisante).
C'est pourquoi, bien que cette espèce soit intégralement protégée, et donc sa capture interdite, il est toléré de prélever des hérissons en difficulté (faibles, blessés ou perdus) pour les apporter à des centres de soins ou chez un vétérinaire. Le Sanctuaire des Hérissons prodigue de nombreux conseils sur son site.
Dans une démarche responsable, tous les hérissons relâchés dans le parc de l'ENS sont issus de sauvetage. Et pour ajouter le gîte au couvert, l'équipe du jardin s'assure qu'il y ait toujours des tas de feuilles et de brindilles disponibles pour que les petites bêtes à épines puissent nidifier confortablement avant les frimas.

Le merle comme sujet d'étude

Cette dynamique récente fait l'objet de plusieurs études scientifiques en Europe et la population de merles noirs du jardin de l'ENS est également suivie pour en comprendre le fonctionnement. La plupart des oiseaux sont en effet capturés par un bagueur du Muséum National d'Histoire Naturelle de façon à pouvoir être ensuite suivis tout au long de leur vie dans le jardin. Les merles reçoivent ainsi sur leurs pattes une bague métallique portant un numéro d' « identité » unique et trois bagues colorées disposées en combinaison unique ce qui permet d'identifier l'individu de façon certaine avec une paire de jumelles. Lors de la capture, le sexe, l'âge, les mensurations et le nombre de tiques portées par l'oiseau sont également enregistrés. Ces données sont ensuite analysées pour comprendre le fonctionnement de la population, et notamment pour calculer le taux de survie moyen des individus sur le site.

15 couples de merles dans le jardin de l'ENS de Lyon

Lorsqu'un oiseau est identifié, les coordonnées GPS de sa position sont enregistrées et utilisées pour définir une carte des territoires des couples qui sont au nombre de 15 sur l'ensemble du jardin. Cette densité est très élevée par rapport à celles connues en milieu rural et forestier, les territoires sont donc beaucoup plus petits, d'une surface d'environ 1 500 m². Ils comportent toujours des massifs arbustifs utilisés par les oiseaux pour construire leur nid, des points hauts que les mâles utilisent pour chanter et surveiller le territoire et des espaces de pelouses et de prairies où se trouve leur source de nourriture principale en milieu urbain : les lombrics. La carte des territoires montre que le jardin est saturé, il n’y a en effet pas d’espace vierge de territoires. Le mode de gestion différencié du jardin offre donc en apparence des conditions satisfaisantes pour le maintien de cette population dont on pourrait même attendre qu'elle soit une source locale d'individus produits par reproduction et qui pourraient coloniser des zones moins favorables. Pourtant, les premiers résultats concernant le succès reproducteur semble raconter une toute autre histoire à découvrir  prochainement.…




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